Que faire...? C'est ce que tu te demandais, encore et encore, en fixant ton bureau d'un air songeur. Tu avais fini tes rapports et autres dossiers, que pouvais-tu faire maintenant ? Rien. À part d'écouter, non d'entendre malgré toi les commérage des derniers membres restant de ton équipe. Il se faisait déjà bien tard, vous n'étiez que peu à être encore en ces lieux. Et il y a deux types de personnes dans ces cas-là : les travailleurs qui, comme toi, finissent dès qu'ils le peuvent le travail, sinon il y a les autres, ceux qui sont obligés d'être là, car ayant procrastiné encore et encore leur dossier jusqu'à être à la limite de leur date buttoir. Quel professionnalisme. Tu n'apprécies guère ces personnes, car elles sont les premières à te critiquer, à te faire rappeler que tout est de ta faute. Un an que cet incident a eu lieu. UN AN. Tu soupires avant de te relever brusquement de ta chaise, faisant cesser les commérages et quittes la bâtisse, non sans offrir un dernier regard au bureau qui avait appartenu à Adonis, ton coéquipier.

Te voilà dehors, dans le froid de l'hiver. Des souvenirs de ton coéquipier et toi pleins la tête. Un sourire contrit se forme sur tes lèvres. Cette époque te manque. Tu soupires avant de t'avancer vers une destination que seul tes pas connaissent. Plus tu t'avances, plus tu te perds dans le passé, de plus en plus loin. Presque au point de revenir à ta première rencontre avec Adonis, ton premier jour en tant que gendarme. Mais ce n'est pas si loin, tu te perds durant la fin de la semaine de ton premier service, tu te souviens qu'il t'entraîne malgré toi vers le district et de son sourire habituel te dire :

T'inquiète, on va juste aller boire un verre... pour fêter ta 1ère semaine, on va dire ?

   
Tu secoues la tête, à la fois semi-amusée par ce souvenir, mais aussi pour revenir à la réalité. Où étais-tu donc en ce moment-même ? Les environs te disent quelques choses, tu regardes à gauche, une rue. Puis, un bar, et pas n'importe lequel, celui où vous aviez l'habitude de vous fourrez, ton partenaire et toi. Même si à la base, c'était toujours lui qui t'entraînait ici. Enfin bref, qu'allais-tu faire maintenant ? Rentrer chez toi ou bien pénétrer dans le lieu sur lequel ta conscience t'a amené ? ... Chiche.

Tu pénètres dans le bar, c'est incroyable de voir qu'il était identique à la dernière fois que tu y es allée. Le décor, l'ambiance, même certains clients ont des têtes qui te sont brièvement familière. C'est presque... Non, c'est nostalgique. Tu te diriges vers le comptoir, près d'une personne bien connue. Tu t'assois mollement sur un des tabouret libre avant de lui dire :  

▬ Hey, ça faisait longtemps...

Oui, tu as bien changé depuis la dernière fois. Mais il a tant de facteur qui font cela, ta fatigue du moment, ta solitude, et surtout la dépression qui te pend au nez. Et dire qu'à ta dernière venue ici, tu respirais la joie de vivre...

Tu t'accoudes avec un certain flegme sur le comptoir, avant de lui adresser un sourire amer. Tu t'es mises plus à l'aise, te mettant dans ta position habituelle en ces lieux. Assises de côté, semi-accoudée, la tête le plus souvent tournée vers tes... Ton interlocuteur habituel. La nostalgie est là, elle est entièrement présente. Elle te dévore presque. Tu es heureuse de le revoir de nouveau, mais cela te fait aussi mal. Le souvenir de ton ex-coéquipier bien présent. Tu ne peux qu'afficher un sourire qui n'en ai pas un. Puis tu te décides enfin de lui répondre de ta nouvelle voix, détruite par ta sombre période et de part ta nouvelle manie de fumer (comme le faisait Adonis) :

▬ Comme d'habitude, s'il te plait

Tu espères qu'il n'a pas oublié avec le temps. Mais tu ne dois pas trop te faire de faux espoir, cela ne fera que plus de mal. Tu n'allais même pas lui en vouloir s'il se trompait. Un an, c'est long. Et puis toi-même tu étais à la limite d'oublier ce que tu avais l'habitude de consommer ici. Mais heureusement, tu t'en souviens. Ta situation n'est pas aussi catastrophique... N'est-ce pas ..? Enfin bon. Autant attendre le résultat. Ton regard s'imagine déjà, avec mélancolie, un Visper juste face à toi.

Tu secoues discrètement de la tête. Aller, tu dois être plus positive que ça, il faut que tu passes un bon moment. Mais aussi que ton interlocuteur soit à l'aise, qu'il passe lui aussi un moment agréable. Tu chasses toute tes sombres idées et te concentres sur Hasu. Cela faisait vraiment un bail que tu ne l'avais pas vu, et il n'avait absolument pas changé. C'est... Agréable. Très agréable. Tu tentes donc de sourire de manière moins... Déprimée ? Mais tu n'es capable que d'afficher un petit sourire satisfait. Donc un sourire discret en somme.  

Tu tentes de le maintenir quand tu dois répondre à son autre question. Il ne dit rien de mal après tout, il n'y a aucun problème dans sa question. C'est juste... Toi le problème. Qui est presque incapable de profiter de la vie comme tu le devrais. Tu es constamment hantée par tes échecs et ta faiblesse. Tu es inutile et tu le sais. Tu réponds à Hasu, avec un faible :    

▬ De même, te revoir fait du bien... Et hum, je ne saurais pas le dire moi-même, la nostalgie peut-être ? Enfin, je suis venue ici sans trop réellement y penser... Sinon, comment vas-tu depuis ?

Tu ajoutes cela un petit rire -certes nerveux, maladroit-, cela semble plutôt pitoyable comme rire. Mais tu es presque contente de cette prouesse. Depuis combien de tant n'as-tu pas ris sans le jouer ? Même de cette manière, peu joyeuse ? Tu ne le sais pas et tu ne veux en réalité même pas le savoir. Tu ne veux pas vraiment savoir depuis combien de temps tu es dans la misère sur le plan moral.

Tu te recules pour éviter le coup qu'allait te donner Hasu dans sa gestuelle. Intérieurement, tu ris de bon coeur. Il y a des chose qui ne changent jamais et c'est tant mieux... Vraiment tant mieux. Tu fixes longuement l'écran désigné. Noerphilie. Tu y es allée à de multiples reprises, mais tu ne te rappelles que peu de tes séjours. Rien que des bribes. Bien que cela te dérange, tu y retournes toujours. Car, à chaque fois que tu reviens de cet endroit, tu te sens toujours un tout petit peu mieux. Et ça, ce n'est pas rien. Tu lâches un son confus, penchant entre le contentement et l'exaspération, avant de reporter ton attention vers ton interlocuteur avant de lui faire signe qu'il n'y avait aucun problème avec ses quelques maladresses.  

▬ Un problème ou quelque chose du genre avec Noerphilie ? C'est bien rare de voir ça, mais il est sûre que je pourrais difficilement faire des éloges de ce monde.

Tu prends une gorgée du Vesper qui se trouve maintenant face à toi, non sans remercier d'un faible sourire Hasu. Ah~ C'était toujours aussi excellent lorsque cela vient de ses mains. C'est ce que tu te dis en dégustant avec grand plaisir le cocktail (se résumant à un semblant de sourire qu'elle avait l'habitude d'orner à l'époque). Ça faisait un long moment que tu n'étais pas permise cela, donc autant profiter du moment. Tu ne te retiens de complimenter ton interlocuteur sur le breuvage. Oui. Il savait toujours aussi bien s'y prendre.   

Tu clignes des yeux une, deux, trois fois face à la proposition de ton vieil ami. Dormir chez lui ? Toutes personnes auraient pensé à une proposition d'une rencontre charnelle, d'une rencontre d'une nuit. Après tout, c'est ce qui pourrait sembler logique à travers ce tableau-ci : Un homme, une femme, un bar (et donc de l'alcool en comme). Quoi de plus ? Mais tu sais ce que lui sous-entend. Il parle d'une proximité amicale, une manière de peut-être rattraper le temps perdu. Sur le moment... Tu ne sais pas quoi dire, tu ne sais pas quoi faire. Cela te ferait du bien de le revoir le plus souvent, mais... Tu sais que tu risquerais de craquer face à lui. Et ça tu ne le souhaites pas. Verser tes larmes et ton chagrin face à un second individu ? Tu te refuses de te montrer de nouveau aussi faible. Et puis il n'y a pas que ça. Tu peux bien lui parler de celui-là, en passant...

▬ J'aurais volontiers accepté ton offre si personne ne m'attendait à l'appartement. Je ne peux décidément pas laisser Atsuhiko seul. Navrée...

Tu consommes de nouveau le breuvage alcoolisé avant de te rendre compte d'un détail. Cela fait moins d'un an que tu as Atsuhiko. Donc Hasu n'a absolument aucune idée de qui cela peut être. Surtout que ta phrase portait confusion. Un léger rougissement apparaît sur tes joues avec de faire de petits gestes des mains en guise de méprise, de malentendu. Avant de dire sur un ton un peu moins morne qu'à ton arrivée dans ces lieux en cette nuit :

▬ A-Ah non non ce n'est pas ce que tu crois ! H-Hum... Atsuhiko est mon chien. Je... Je ne l'ai depuis pas si longtemps que ça, donc c'est normal que tu n'en ais jamais entendu parler

Tu te frottes l'arrière de ton cou avec une fine moue au visage. Plutôt perturbée par la brusque tournure d'ambiance -qui n'était pas désagréable, en passant.-