Morgane est née dans une famille aisée à Paris. Son père est PDG d'une entreprise de sidérurgie. Sa mère fait partie du bureau de cette même entreprise. Très occupés, ils n'ont jamais été très présents pour elle et elle a passé bien plus de temps dans les bras de sa nourrice que dans ceux de sa mère. Au début, c'était une enfant plutôt quelconque, qui ne se faisait pas trop remarquer, si ce n'était par les tenues dignes d'une poupée dont l'habillait sa mère. Pas de difficulté scolaire particulière, sans jamais avoir de vraiment bonne note. Elle n'était pas asociale, mais n'allait pas vraiment vers les autres enfants d'elle-même. Une enfant moyenne en tout ce qu'elle entreprenait, ni bonne, ni mauvaise, qui faisait – elle le savait même s'il ne le disaient pas devant elle – la déception de ses parents.

Ce n'est qu'a l'âge de dix ans que ses notes commencèrent à monter en flèche jusqu'à atteindre, la plupart du temps, la perfection. Une mémoire véritablement hors du commun. A un niveau où l'apprentissage par cœur des leçons représente l'essentiel du travail, cela devenait pour elle un jeu d'enfant. Cela suscita un regain d'intérêt de la part de ses parents, qui la poussèrent à progresser toujours plus, pas toujours de manière très agréable. Elle sauta plusieurs classes et se retrouva avec des camarades bien plus vieux qu'elle et avec qui elle avait peu de point commun. L'enfant discrète, mais acceptée dans le groupe devint l'adolescente à éviter, la favorite des professeurs qu'on jalouse et dont on se moque. Ce qu'elle faisait n'était cependant jamais assez bien pour ses parents qui auraient souhaité qu'elle étudie plus encore, éternels insatisfait. Des vingt sur vingt ne leur suffisaient plus. Ils désiraient qu'elle étende toujours plus sa culture général et se plaignaient quand elle avait envie de faire des choses plus de son âge comme faire des jeux de constructions ou jouer à la poupée. Les règles étaient très strictes. Ils ne dictaient pas seulement la manière dont elle devait passer son temps libre, mais aussi la manière dont elle devait s'habiller, se comporter... Même si elle avait eu une amie chez qui elle aurait pu dormir, par exemple, ses parents lui auraient sûrement imposé de rester à la maison. Cependant, elle n'avait personne avec qui passer du temps ailleurs, ce qui les arrangeait merveilleusement.

Le lycée terminé à 14 ans, elle obtint par elle-même une bourse pour l'université d'Harvard, aux Etats-Unis, et quitta la France. Elle s'en réjouit, car ses relations avec ses parents devenaient de plus en plus difficile. Elle avait du mal à voir de l'amour dans cette volonté incessante de la pousser vers le haut sans se soucier de son avis, plutôt un certain égoïsme, un désir de se démarquer en montrant que leur enfant était mieux que les autres. Ses parents furent très heureux de cette initiative d'entrer dans une université prestigieuse. Morgane le savait. C'était d'ailleurs pour ça qu'elle avait choisi cet endroit. Ainsi, ils ne poseraient pas de problème lorsqu'il s'agirait d'obtenir l'argent pour prendre l'avion seule, bien qu'elle fût mineure. Elle suivit un double cursus en informatique et en biologie. Là-bas, elle sut mieux s'intégrer et se fit plus d'amis, d'autres gens aussi intelligents qu'elle. Les gens issus de familles riches la snobaient cependant. Bien que son père ait une place de choix dans ce monde, la jeune femme profitait de sa nouvelle liberté pour se relâcher un peu. Son attitude et son apparence un peu négligée avait tendance à les garder à distance. Pas que cela la dérangeât, cela dit.

A 21 ans, ayant obtenu ses deux doctorats avec mention, Morgane rentra en France. Ses parents virent alors ce qu'elle était devenue. Ce fut le début d'une série de dispute sur ce qu'elle devait faire de sa vie et sur sa nouvelle attitude trop désinvolte à leur goût. Au bout de quelques mois, elle considéra ses parents comme définitivement toxiques et décida de couper les ponts avec eux. Sa collections de prestigieux diplômes en poche, elle n'eut aucun mal à dégotter un boulot qui lui plaisait, en l'occurrence comme analyste à la police scientifique de la capitale. Elle put alors prendre son propre appartement et débuter une nouvelle vie qui lui convenait parfaitement. Son travail lui prenait beaucoup de temps, de jour comme de nuit, et une bonne partie du temps qui lui restait, elle lisait des quantités une quantité astronomiques de livres, qui s'entassaient dans la petite chambre en tas au fur et à mesure. La jeune femme n'était pas trop portée sur le rangement, et de toute façon, il n'y aurait jamais eu assez de place sur ses étagères. Elle était aussi très portée sur les jeux vidéos. Cela n'aurait certainement pas plu à ses parents, mais étrangement, cela l'en rendait fière.

Quelques années plus tard, une nouvelle fit véritablement sensation sur la toile : il existerait, dans une ville japonaise, un tout nouveau genre de jeu vidéo, où l'on pouvait se rendre physiquement. Au début, cela ressemblait à une grosse blague, et à peine crédible avec ça. Mais les témoignages enthousiastes se multipliaient, à tel point qu'elle finit par y accorder plus d'attention. Une idée germa progressivement dans sa tête. Ici, elle n'avait pas d'attache particulière, et chaque jour, la possibilité de croiser sa mère ou son père dans la rue l'agaçait prodigieusement, l'empêchant d'avancer correctement dans sa vie. Et si elle partait s'installer dans un autre pays, histoire de vérifier cette folle rumeur ?

Elle est désormais officiellement analyste dans la police d'Iteku et habite un petit deux pièces haut perché dans un immeuble du centre-ville. De temps à autre, elle se rend à l'université pour donner un cours. En effet, elle a eu la surprise de croiser une de ses anciennes camarades japonaise de Harvard, désormais enseignante à l'université d'Itaku, qui semblait très enthousiaste à cette idée, et il lui a été difficile de refuser, d'autant que l'expérience n'est pas désagréable. Maintenant qu'elle est bien installée, il est temps d'aller faire un tour en Noerphilie...