Je l'ai entendu comme la cloche qui sonnait la fin de la panade, et l'ai aperçu telle la lumière au bout du couloir. Le symbole. Le symbole de ma libération...
Avant ça, je n'avais côtoyé que les ténèbres. La colère, la douleur... La fièvre, la rage, celle qui transforme les hommes bons, cruels. Mes muscles restaient figés devant son élocution, mais mon esprit, mon esprit lui avait comprit que c'était le moment de foutre les voiles. Loin. Plus précisément vers Iteku.
Alors j'me suis débrouillé pour emprunter sa moto à un pote et j'ai roulé. J'ai roulé. J'ai roulé. J'ai quitté mon trou paumé de Sapporo, j'ai tout laissé tombé. Ma famille ; mes parents et ma plus jeune sœur se débrouillaient déjà très bien sans moi. Mon job ; je n'y étais que par intérêt. Essayer de s'en sortir professionnellement parlant... Quelle plaie j'vous jure. J'avais tout foiré dans ma carrière étudiant, j'm'en retrouvais obligé à confectionner des pâtisseries. Taff que j'avais dégoté par le biais de relations, qui plus est. Mes amis ; ils m'avaient vu de dos pour la dernière fois, moi. Ce type qu'ils avaient fréquenté depuis l'enfance et qui, au court de sa vie, avaient cumulés les problèmes. Les bastons, les mauvaises fréquentations, les pouffes et les lieux mal-famés pour finalement se foirer aux examens d'entrée d'une université pourrie et se retrouver les mains dans la pâte de haricots rouges.
J'avais tout raté ; je reconnaissais en la voix de cette gonzesse l'appel qui me sommait à succomber. Un nouveau monde, une nouvelle vie. Un refuge, une seconde chance. De plus, l'occasion d'incinérer ces souvenirs de combats de rue, de prises de tête avec des bouffons, de soirées au poste de police et j'en passe. Dans ce bordel j'y avais même perdu mon meilleur ami. Tout ça pour quoi, exposer en vitrine et vendre à des vieilles ou des collégiennes ?
J'fus ridicule jusqu'au bout. Avec les problèmes de trafics sur les routes et ma hâte d'arriver à Iteku, j'en pris des détours qui démontraient de mon sens de l'orientation déplorable, et de ma connaissance de la géographie et de l'économie – pour ce qui était de l'essence, bien moins honorable. Au cours de ma route, j'entendis de toute les rumeurs, en ne me fiant qu'à une seule d'entre elle ; une vie subjuguée d'action néanmoins parsemée de repos pour les aventuriers. Avec à la clef, une récompense éternelle.
C'est sûrement un ramassis de déchets, mais j'préfère croire en un futur que je me chargerai de réaliser qu'un passé gâché.
De cette manière j'me suis retrouvé ici, à Noer-machin-chouette et vous, grand-père, qui m'avez écouté bavasser.