Moïra est née la première de sa fratrie. Un beau bébé jouflu qui se tortillait avec déjà une petite mèche rousse crolée sur le crâne. Sa naissance qui fut le plus beau jour de la vie de ses parents fut suivie de très près par son faux jumeau, plus maigre déjà, comme si son aînée avait pris une partie de sa nourriture pour elle. La maman très affaiblie par ce dur et long travail voulut tout de même prendre sa petite fille dans ses bras. La petite Moïra qui avait hérité du roux écossais de la famille se révéla être plus forte tête que son jumeau, elle en fit d'ailleurs pas mal baver ses précepteurs. Du haut de ses trois ans elle se baladait déjà avec son épée en bois et n'hésitait pas à s'en servir à la moindre réprimande venant de ceux qui ne faisaient pas partie de sa famille. Calum quant à lui se révélait être l'enfant parfait, calme, bien élevé, intelligent, studieux, poli. Jusqu' à leurs cinq ans ils suivirent tous deux des cours à domicile avant d'entrer à l'école primaire.

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On pourrait croire que Moïra aura du coup grandi un peu dans l'ombre de son frère si parfait, mais elle avait une famille bien trop attentive pour laisser pareille difficulté s'installer. Quand elle n'avait pas école, elle se perfectionnait en équitation. L'école fut une période très difficile pour la demoiselle, tout d'abord parce qu'elle est quelqu'un de facilement distrait, mais aussi d'un peu hyperactif par moments. Elle n'avait qu'une hâte, rentrer chez elle pour pouvoir vaquer à ses petites occupations.

Vers le début de l'adolescence, Moïra connut une longue phase à vide, pour mettre des mots nous dirons qu'elle connut une dépression, suite à la mort de son père. Cela créa un gouffre au fond de son coeur, gouffre de tristesse infinie. Son père avait toujours été son modèle, son  roc, son confident. Une partie d'elle venait de mourir.



Un de ces jours, gris sur ton de gris, Calum vint me trouver, alors que j'étais couchée sur le dos de ma brave jument nommée Rowtag, à ruminer mes erreurs. Et bien qu'il ne soit pas d'ordinaire très attentif, il avait remarqué que quelque chose s'était brisé. Avais-je tant changer que cela en l'espace de quelques mois ? Finalement mon regard bleu-vert s'était posé sur mon frère, qu'au fond je connaissais pas si bien malgré le fait qu'il soit mon jumeau. Un soupire m'avait échappé.

Il s'était approché et m'avait prise dans ses bras, à la manière d'une princesse pour me faire descendre de Rowtag; je le vis tressaillir sous l'effort, et une fois que je fus à sa hauteur, il me serra contre lui, son visage plongé dans mes boucles épaisses et rousses. Avec lenteur il me chuchota.

- Quelle que soit ta douleur Mo', saches que je suis là pour toi. Je n'aime pas te voir ruminer comme ça..

Il s'était un peu écarté, ses yeux brillaient d'émotion, et il me fit un grand sourire. Comme une idiote, je n'arrivais plus à bouger, je me contentai d'acquiescer, alors que quelques larmes roulèrent sur mes joues. Je soupirai une nouvelle fois, mais de bonheur cette fois-ci.

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C'est à ce moment précis qu'ils devinrent très proches, voire même presque fusionnels. Bien que cela soit étrange. Un jour ils parlèrent de leur projet commun de voyager lors d'un repas, le Clan, ou du moins ce qu'il en restait, les encouragea fortement à partir, quitter cette bonne vieille Écosse pour voir le monde.

Ce fut ce même clan qui leur récolta les fonds pour prendre la mer. Les jumeaux, accompagnés de leur oncle Malcolm partirent avec quelques bagages seulement et Rowtag, que Moïra ne se résignait pas à laisser seule de longues années.
Ils commencèrent leur périple par l'Europe, puis ils se rendirent en Afrique- ce voyage fut très court car les écossais ne supportaient pas son climat, en Russie.
Puis lorsqu'ils arrivèrent finalement en Chine, ils eurent vent d'une bien drôle de rumeur. Il était dit qu'il y a de cela quelques mois, une annonce avait été faite d'ans une ville particulière au Japon . Cette annonce disait en substance que si l'on souhaitait une nouvelle vie, il suffisait de passer à travers un écran, on débarquait alors dans un nouveau monde où on était libre de pouvoir être qui l'on voulait. Quelle intéressante légende urbaine ! Cela intrigua si fortement la jeune femme, qu'au bout de quelques jours elle n'avait plus qu'une idée en tête. Se rendre à Iteku pour voir si  il s'agissait d'un mythe ou de la réalité.

Pilant son frère, il accepta finalement de céder à son caprice de gamine. Étant plutôt quelqu'un de lucide et scientifique, il n'y croyait pas du tout. Mais bon, à l'heure actuelle ce n'était plus très loin.

Lorsqu'il mirent les pieds à Iteku, à deux sur le dos de leur énorme percheron Rowtag, on les dévisagea. Il était vrai que cela semblait être la folie dans ce lieu. Finalement il attachèrent la jument un peu plus loin, et pénétrèrent dans un magasin de hifi-tv. Ils questionnèrent le vendeur sur la légende qui circulait, et celui-ci leur certifia qu'il ne s'agissait pas d' une légende. Incrédules, tous deux demandèrent d'une même voix, s'ils pouvaient utiliser un des écrans qui se trouvaient exposés dans son magasin. Le vendeur acquiesça.

Les jumeaux échangèrent un regard. Ils pensèrent alors à l'unisson *Ensemble*



Les jumeaux se tenant la main, ce fut Moïra qui fut la plus curieuse et passa sa main à travers l'écran. Elle vit les pixels entourer son bras, cela la chatouillait. Elle sourit et entraîna son frère, quelque peu réticent, à travers cet écran. Elle resta quelques instants bouche bée devant le spectacle qui s'offrait à elle. Elle n'avait jamais rien vu d'aussi beau. Elle avait découvert la Noerphilie pour la première fois. Elle ne remarquera que bien plus tard que physiquement elle avait bien changé.

Par conte, un changement qui la marqua très fort fut la forme qu'avait prise son jumeau. Étais-ce bien lui d'ailleurs ? Moïra s'était retournée pour regarder ce qui se trouvait à côté d'elle. Une peau écailleuse, des ailes, de grands yeux verts. Elle avait frissonné, en poussant un cri de dégoût. Alors qu'elle essayait de s'enfuir elle vit que la créature la suivait. Et finalement celle-ci lui sauta dessus, la faisant tomber. Lorsque la créature posa ses yeux dans les siens, elle reconnut ses prunelles, prunelles avec qui elle avait grandi.

-.. Cal.. Calum ?

Elle avait enfin compris. Alors qu'elle était couchée sur le dos, le dragon noir sur elle, elle comprit qu'elle aussi n'était plus elle même. Elle le comprit lorsqu'elle vit la tête de Calum se blottir dans sa chevelure blanche.

Hélas cela ne pouvait être qu'un aller-retour. Rowtag les attendait. Mais ils reviendraient.